S'adapter à une situation exceptionnelle
Nous traversons, collectivement, une période difficile depuis plusieurs mois. Inédite tant par son ampleur géographique que par l’impact gigantesque qu’elle a sur nos habitudes individuelles. Tenus éloignés de notre travail, de nos amis, du dojo, c’est un chamboulement profond pour chacun de nous, et dont nous sommes seuls à pouvoir décider s’il est positif ou non.
Et cette perception que nous avons de la situation variera probablement aussi en fonction du temps. Je me souviens avoir été particulièrement difficile dans les 3-4 premières semaines, à mesure que les difficultés avançaient et que je voyais mes plans s’annuler les uns après les autres. Etant dans une sorte de semi-confinement depuis environ 15 semaines, j’ai ainsi pu passer par presque toutes les étapes du deuil: le déni, la colère, la tristesse, la résignation, l’acceptation et la reconstruction.
Une occasion de se réinventer
Lors de mes premières semaines à la maison, soyons honnêtes, je ne me suis pas réinventé. J’ai continué à faire ce que je faisais jusque là. Aller au yoga tous les jours car mon studio était encore ouvert, et pratiquer l’Aunkai à la maison ou en bas de l’immeuble. Rien de bien nouveau.
Le temps passant, j’ai souhaité donner des pistes d’entrainement à mes élèves et j’ai donc commencé à filmer un certain nombre de vidéos pédagogiques pour eux. En réfléchissant à la meilleure façon de faire passer certaines idées, j’en ai également trouvé de nouvelles que je me suis empressé d’explorer par moi-même. Rob m’a également soutenu dans cette démarche, et non content de me faire un retour sur les impressions que je lui envoyais, il m’a également consacré quelques heures en vision, me permettant d’avancer presqu’aussi vite que si nous avions pu nous voir en personne.
D’un point de vue personnel, et ce même si j’ai du annuler la venue de Rob en février que le Gasshuku d’Aunkai en avril a été annulé, j’ai sans doute progressé plus pendant cette période que pendant la précédente.
Mais au-delà de la simple adaptation de la pratique, cette situation est une occasion de nous réinventer, et potentiellement de changer des habitudes que nous avons et qui ne nous conviennent en réalité pas.
Je suis typiquement sédentaire, dans le sens où même si j’essaie de m’entrainer matin, midi et soir dans la mesure du possible, je travaille dans un bureau, devant un ordinateur, assis sur une chaise pendant de nombreuses heures chaque jour. Aussi insignifiant que cela puisse paraitre, je n’ai plus de doute depuis longtemps sur le fait que maintenir une position unique (quelle qu’elle soit) pendant 8 heures par jour est dommageable pour notre corps. Dans mon cas, la position assise a notamment un impact non-négligeable sur la raideur de mes hanches et de mes chevilles, mais également sur ma bonne circulation sanguine et mon retour veineux.
J’ai la chance de pouvoir travailler depuis la maison sans difficultés. Au début, suivant mes habitudes précédentes, je travaillais sur le bureau de ma chambre, assis sur ma chaise. Et puis ma femme a également commencé à travailler à la maison et nous nous sommes finalement répartis les chambres. Depuis plus de deux mois maintenant, je travaille depuis la chambre des enfants, debout en mettant mon ordinateur en équilibre sur l’un des lits, ou tout simplement assis par terre. Car le problème n’est pas d’être assis, mais bien de maintenir une position unique, chose difficile à faire au sol puisque toute position devient rapidement inconfortable et qu’il devient donc nécessaire d’en changer régulièrement.
Ce changement, associé à un travail spécifique de mobilisation articulaire au niveau des chevilles et des hanches m’a non seulement redonné plus d’espace, mais a également très fortement diminué les douleurs liées à mes problèmes veineux.
Enfants aidant, j’ai aussi un salon… recouvert de tapis. L’occasion de marcher à quatre pattes, ramper, rouler mais également tout simplement de s’asseoir par terre ou de descendre au sol et remonter sans l’inconfort d’un sol dur. Aujourd’hui, je m’assois sur une chaise moins d’une heure par jour, quand je sors déjeuner à l’extérieur.
L’esprit Budo
On peut faire dire tout et n’importe quoi à l’esprit du Budo. Fantasme par excellence des pratiquants d’arts martiaux, en partie issu de la propagande japonaise pour rendre la population fière de sa nation et de ses racines, on aime y voir un courage particulier face à la mort, que le pratique d’arts martiaux aurait évidemment en lui grâce à sa pratique.
Et ça serait évidemment merveilleux si c’était le cas.
Le Covid attaque indifféremment hommes, femmes, enfants, de tous âges, classes sociales et activités. La pratique d’un art martial, si elle est sûrement bénéfique pour la santé en général, n’apporte pas d’immunité particulière, et il est important de se le rappeler. Il ne s’agit pas d’aller pratique pour combattre cet ennemi invisible, mais au contraire de savoir se garder de pratiquer, ou du moins de pratiquer avec partenaires, pendant quelques temps pour ne pas faire le jeu de l’épidémie et ne pas contribuer à la répandre. Il ne s’agit pas de gonfler la poitrine et de jouer les hommes forts, descendants de samourai, mais de revenir humblement à la réalité.
Beaucoup de pratiquants ne seraient sans doute pas en danger eux-mêmes, tout simplement parce qu’ils ne sont pas à risque, mais ils peuvent cependant être porteurs du virus, et le transmettre largement à des populations qui elles sont à risque, contribuant à saturer des hôpitaux qui n’en ont pas besoin.
On voit encore aujourd’hui des enseignants, au nom du Budo ou d’un art martial en particulier, partir en guerre contre le système, crier à la conspiration et encourager largement à retourner pratiquer comme si de rien n’était. J’y vois à titre personnel de l’irresponsabilité.
Cette situation n’est agréable pour personne, nous aurions tous souhaité pouvoir sortir librement, voir nos proches, pratiquer normalement. Certains d’entre nous, dont je fais partie, ont plus de chance que d’autres puisqu’ils peuvent facilement travailler à distance. Pour d’autres c’est évidemment beaucoup plus difficile, qu’ils soient en première ligne ou que leur activité nécessite de rencontrer des gens en personne. Dans une situation aussi complexe, il est difficile pour tous de réaliser pleinement ce qui est prioritaire et ce qui ne l’est pas, au niveau de la nation, ou au niveau international. A notre niveau en revanche, il est essentiel que nous prenions conscience de ce qui est essentiel et de ce qui ne l’est pas dans nos activités.
Et cette perception que nous avons de la situation variera probablement aussi en fonction du temps. Je me souviens avoir été particulièrement difficile dans les 3-4 premières semaines, à mesure que les difficultés avançaient et que je voyais mes plans s’annuler les uns après les autres. Etant dans une sorte de semi-confinement depuis environ 15 semaines, j’ai ainsi pu passer par presque toutes les étapes du deuil: le déni, la colère, la tristesse, la résignation, l’acceptation et la reconstruction.
Une occasion de se réinventer
Lors de mes premières semaines à la maison, soyons honnêtes, je ne me suis pas réinventé. J’ai continué à faire ce que je faisais jusque là. Aller au yoga tous les jours car mon studio était encore ouvert, et pratiquer l’Aunkai à la maison ou en bas de l’immeuble. Rien de bien nouveau.
Le temps passant, j’ai souhaité donner des pistes d’entrainement à mes élèves et j’ai donc commencé à filmer un certain nombre de vidéos pédagogiques pour eux. En réfléchissant à la meilleure façon de faire passer certaines idées, j’en ai également trouvé de nouvelles que je me suis empressé d’explorer par moi-même. Rob m’a également soutenu dans cette démarche, et non content de me faire un retour sur les impressions que je lui envoyais, il m’a également consacré quelques heures en vision, me permettant d’avancer presqu’aussi vite que si nous avions pu nous voir en personne.
D’un point de vue personnel, et ce même si j’ai du annuler la venue de Rob en février que le Gasshuku d’Aunkai en avril a été annulé, j’ai sans doute progressé plus pendant cette période que pendant la précédente.
Mais au-delà de la simple adaptation de la pratique, cette situation est une occasion de nous réinventer, et potentiellement de changer des habitudes que nous avons et qui ne nous conviennent en réalité pas.
Je suis typiquement sédentaire, dans le sens où même si j’essaie de m’entrainer matin, midi et soir dans la mesure du possible, je travaille dans un bureau, devant un ordinateur, assis sur une chaise pendant de nombreuses heures chaque jour. Aussi insignifiant que cela puisse paraitre, je n’ai plus de doute depuis longtemps sur le fait que maintenir une position unique (quelle qu’elle soit) pendant 8 heures par jour est dommageable pour notre corps. Dans mon cas, la position assise a notamment un impact non-négligeable sur la raideur de mes hanches et de mes chevilles, mais également sur ma bonne circulation sanguine et mon retour veineux.
J’ai la chance de pouvoir travailler depuis la maison sans difficultés. Au début, suivant mes habitudes précédentes, je travaillais sur le bureau de ma chambre, assis sur ma chaise. Et puis ma femme a également commencé à travailler à la maison et nous nous sommes finalement répartis les chambres. Depuis plus de deux mois maintenant, je travaille depuis la chambre des enfants, debout en mettant mon ordinateur en équilibre sur l’un des lits, ou tout simplement assis par terre. Car le problème n’est pas d’être assis, mais bien de maintenir une position unique, chose difficile à faire au sol puisque toute position devient rapidement inconfortable et qu’il devient donc nécessaire d’en changer régulièrement.
Ce changement, associé à un travail spécifique de mobilisation articulaire au niveau des chevilles et des hanches m’a non seulement redonné plus d’espace, mais a également très fortement diminué les douleurs liées à mes problèmes veineux.
Enfants aidant, j’ai aussi un salon… recouvert de tapis. L’occasion de marcher à quatre pattes, ramper, rouler mais également tout simplement de s’asseoir par terre ou de descendre au sol et remonter sans l’inconfort d’un sol dur. Aujourd’hui, je m’assois sur une chaise moins d’une heure par jour, quand je sors déjeuner à l’extérieur.
L’esprit Budo
On peut faire dire tout et n’importe quoi à l’esprit du Budo. Fantasme par excellence des pratiquants d’arts martiaux, en partie issu de la propagande japonaise pour rendre la population fière de sa nation et de ses racines, on aime y voir un courage particulier face à la mort, que le pratique d’arts martiaux aurait évidemment en lui grâce à sa pratique.
Et ça serait évidemment merveilleux si c’était le cas.
Le Covid attaque indifféremment hommes, femmes, enfants, de tous âges, classes sociales et activités. La pratique d’un art martial, si elle est sûrement bénéfique pour la santé en général, n’apporte pas d’immunité particulière, et il est important de se le rappeler. Il ne s’agit pas d’aller pratique pour combattre cet ennemi invisible, mais au contraire de savoir se garder de pratiquer, ou du moins de pratiquer avec partenaires, pendant quelques temps pour ne pas faire le jeu de l’épidémie et ne pas contribuer à la répandre. Il ne s’agit pas de gonfler la poitrine et de jouer les hommes forts, descendants de samourai, mais de revenir humblement à la réalité.
Beaucoup de pratiquants ne seraient sans doute pas en danger eux-mêmes, tout simplement parce qu’ils ne sont pas à risque, mais ils peuvent cependant être porteurs du virus, et le transmettre largement à des populations qui elles sont à risque, contribuant à saturer des hôpitaux qui n’en ont pas besoin.
On voit encore aujourd’hui des enseignants, au nom du Budo ou d’un art martial en particulier, partir en guerre contre le système, crier à la conspiration et encourager largement à retourner pratiquer comme si de rien n’était. J’y vois à titre personnel de l’irresponsabilité.
Cette situation n’est agréable pour personne, nous aurions tous souhaité pouvoir sortir librement, voir nos proches, pratiquer normalement. Certains d’entre nous, dont je fais partie, ont plus de chance que d’autres puisqu’ils peuvent facilement travailler à distance. Pour d’autres c’est évidemment beaucoup plus difficile, qu’ils soient en première ligne ou que leur activité nécessite de rencontrer des gens en personne. Dans une situation aussi complexe, il est difficile pour tous de réaliser pleinement ce qui est prioritaire et ce qui ne l’est pas, au niveau de la nation, ou au niveau international. A notre niveau en revanche, il est essentiel que nous prenions conscience de ce qui est essentiel et de ce qui ne l’est pas dans nos activités.
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