Unité de base
La lecture de l’excellent blog Budoshugyosha sur Yukiyoshi Sagawa, doublé du second ouvrage de Kimura sur Sagawa que Fred a eu la bonté de m’offrir, me permet de me reposer la question de l’Aiki et des moyens à mettre en place pour le maitriser.
Un élément que je
trouve intéressant car il dépasse les querelles d’écoles, voire même les frontières
est celui des unités de base : nombre de répétitions, nombre d’années, qui
montre l’importance de pétrir le corps et de le modeler par la répétition.
3 ans
Alors que l'on parle souvent de dix ans de pratique comme une base, les trois ans sont l'unité de base de l'apprentissage la plus courte que j'ai vue.
De nombreuses
citations de Yoshimaru sensei dans l’article d’Eric vont dans le sens des 3 ans
comme unité de base :
19 septembre 1974
En
utilisant un sabre, les suburi sont votre base. Etendez et faites de grandes
coupes vers le bas sans tension. Au moins 300 fois par jour - si vous ne le
faites pas durant trois ans cela ne vous imprégnera pas
23 juillet 1971
J'ai
construit mon corps à travers les pompes. Adolescent, j'en effectuais 1500 par
jour. Grace à cela, mon corps devint unifié. Il n'y a pas de limite aux pompes,
mais il est important de poursuivre chaque méthode d'entrainement physique
durant au moins trois ans, les suburi par exemple
Mais au-delà du
groupe de Sagawa, ces trois ans me font penser à ce qui se dit dans les écoles
de Karaté et je crois me souvenir avoir lu des exemples dans le livre de Lionel
(qu’il faudrait honnêtement que je relise pour rafraîchir ma mémoire). « Hito
kata san nen », i.e. « trois ans pour un kata ». Tradition qui vient certainement des arts
chinois (puisque les écoles de Karaté y puisent leurs sources) ou l’on
passait trois ans à apprendre une position.
Dans l’école de
Kuroda sensei, il était à une époque demandé aux futurs membres du dojo de
pratiquer le suburi de base de l’école pendant trois années.
Pourquoi trois
ans et pas deux ou quatre ? Je n’en sais rien, mais empiriquement c’est un
laps de temps qui me semble approprié. J’ai débuté Aunkai il y a trois ans et
pendant ces trois années j’ai utilisé le matériel qu’Akuzawa sensei m’a donné.
Il a été éclairé par de nombreuses lectures (ouvrages sur Sagawa, blogs des
aficionados, Kwoon) et des passages éclairs à Tokyo et au Kishinkan. Aujourd’hui
je ressens un besoin clair d’évaluer le travail effectué et de développer cette
base, aussi faible soit-elle. Il est possible qu’il y ait aussi un aspect
psychologique dans ces trois années, avec un besoin de renouveau quand on
arrive en bout de cycle.
100, 1000, 10000
L’autre unité de
base est celle du nombre de répétitions. Qu’il s’agisse de suburi par centaines
comme ce que je faisais a Seoul, ou ce qui se fait dans de nombreuses écoles de
sabre.
« Pour avoir
l’idée d’un geste, il faut le faire mille fois. Pour le connaître, il faut
l’exécuter dix mille fois. Pour le posséder, il faut le répéter cent mille fois »
est une citation classique qui va dans ce sens.
Dans son livre,
Kimura raconte que Sagawa lui avait dit de faire Shiko 1000 fois par jour. Ce
qui fait tourner la tête quand on pense au temps que ça représente. Il me
semble que le Shiko du Daito Ryu monte moins haut que ceux d’Aunkai et du Sumo,
ce qui le rend peut etre plus rapide et moins dur physiquement, mais cela reste
particulièrement éprouvant. En particulier quand Kimura explique qu’il le
pratiquait parfois jusqu'à 10,000 fois…
Il y a à nouveau
plusieurs citations sur le blog d’Eric qui vont dans ce sens.
Pourquoi un si
grand nombre ? Je suppose que le grand
nombre vient du fait de dépasser ses limites et la douleur, ce qui permet au
fur et à mesure de comprendre ce qui doit être changé pour effectuer le
mouvement sans force. Il s’agit aussi de faire rentrer les mouvements dans le
corps par un pétrissage long et quotidien. Reconstruire le corps sur de
nouvelles bases.
Je pensais a cela
pendant ma pause déjeuner, et arrivé dans un grand parc en bord de mer, j’ai eu
envie de tester ces unités de base, et plus particulièrement celle des
centaines/milliers. J’ai choisi mon tanren préféré, Shiko, que j’ai envie d’explorer
plus à fond et j’ai débuté mes répétitions face à la mer. 200 pour cette fois
alors que je ne crois pas l’avoir fait plus de 100 fois d’affilée auparavant.
Je n’ai pas continué plus longtemps faute de temps (et pour ne pas revenir au
bureau trempé de sueur) mais je vais essayer d’approcher progressivement le
millier, juste pour voir ce qui se passe.
Commentaires
Mais 10000 tanren par jour hmmm... il faut le temps matériel de les caser... même à 2 sec. par tanren sans s'arrêter... ça occupe les journées :P
Par contre, je crois également qu'il faut effectuer par centaine certains exercices car avec l'accumulation, vient la fatigue, et l'obligation de rechercher le principal moteur du mouvement si on veut continuer...c'est sans doute un moyen d'épurer le mouvement mais également de se concentrer sur le coeur des choses.
Par contre atant que je ne suis pas rentier, il va falloir se contenter de peu d'exos pour faire ca
Maintenant il y a deux choses que je garde en tête. Une citation sur le blog d’Eric disant que si on ne met pas d’intention derrière, les répétitions ne servent à rien. Une autre d’Akuzawa lors de mon premier passage disant que faire 10 shiko s’ils étaient bien faits était mieux que 50 faits n’importe comment. Je vais donc tenter de pousser l’exercice en gardant le plus possible les critères importants. Dans le cas contraire ca serait une perte de temps